Comment engager la responsabilité du dirigeant lors d’une procédure collective

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Découvrez dans cet article comment il est possible d’engager la responsabilité d’un dirigeant en cas de fautes de gestion lors d’une procédure collective.

Mise en contexte

En effet, lorsque les dirigeants d’une entreprise commettent une faute de gestion préjudiciable à la société, ils peuvent être tenus responsables civilement voire même pénalement.

Les associés ont la possibilité d’engager cette action, car il est peu probable que les dirigeants se poursuivent eux-mêmes.

L’action sociale ut singuli se différencie de l’action ut universi, qui consiste à engager la responsabilité de la société par le biais de ses représentants.

L’action sociale ut singuli peut être exercée à tout moment de la vie de la société, y compris lors de procédures collectives.

Avant d’aborder la mise en œuvre de cette action dans le cadre de procédures collectives, il est nécessaire d’exposer son régime juridique.

Qu’est ce qu’une action sociale ut singuli ?

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L’action ut singuli permet aux associés, sous certaines conditions, d’assigner les représentants sociaux en réparation d’un préjudice causé à la société. Cette demande est indépendante d’éventuels préjudices subis personnellement par les associés.

Champs d’application

L’action sociale ut singuli est régie par l’article 1843-5  du code civil.

Cette action était à l’origine réservée aux sociétés commerciales. Cependant le législateur l’a étendu à toutes les sociétés avec la loi n°88-15 du 5 janvier 1988 dont les dispositions ont inspiré le présent article 1843-5.

Cette action présuppose l’existence d’une faute de gestion des dirigeants sociaux dans l’exercice de leur mandat.

Ainsi, cette action permet d’obtenir non seulement la réparation d’un préjudice causé à la société mais également la nullité de tout acte adopté par les organes sociaux au préjudice de la société (Cass, Com, 16 octobre 1972 n°70-13691). Les dommages-intérêts intègreront l’actif social.

Cette action se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou de la révélation dudit fait lorsqu’il a été dissimulé (art. L 225-254 du code de commerce).

Qui a qualité à agir ?

Un seul associé peut introduire l’action et ce peu importe son pourcentage de détention du capital.

Il suffit seulement qu’il ait la qualité d’associé le jour où il assigne les dirigeants sociaux au nom et pour le compte de la société (Cass. com., 6 mai 1991, n° 89-16.900).

En revanche, la cession des titres entraine automatiquement la perte de la qualité d’associé. Ainsi le cédant ne pourra introduire l’action même si le fait dommageable est intervenu antérieurement à la cession. En effet, la qualité d’associé s’apprécie au moment de l’introduction de l’action (CA Paris, 6 avr. 2001 : JurisData n° 2001-167239).  Le cessionnaire pourra en revanche introduire l’action et ce pour un fait dommageable antérieur à son entrée dans le capital.

Le demandeur devra conserver sa qualité d’associé pendant toute la durée de l’instance.

La loi permet également à plusieurs associés de mandater, à l’unanimité et sous certaines conditions, un associé afin de les représenter en vue d’exercer l’action ut singuli. (C. com., art. L. 223-22, al. 3, art. L. 225-252, art. R. 223-31 et R. 225-169)

Les modalités d’action

Le tribunal ne pourra statuer que si la société est régulièrement mise en cause. Pour que les décisions soient rendues opposables, la société devra être représentée lors de l’audience en présence de l’associé demandeur (ou des associés demandeurs).

Les associés demandeurs pourront également exercer les voies de recours au nom de la société.

La subsidiarité de l’action ut singuli

L’action ut singuli est une action subsidiaire. Cela veut dire que le demandeur ne peut l’introduite qu’en cas de défaillance ou de négligence des représentants légaux de la société.

La jurisprudence a admis qu’un associé ne sera recevable que lorsque la société n’aura pas elle-même intenté une action en responsabilité contre ses dirigeants (CA Douai, 29 avr. 1997).

Il peut arriver que les dirigeants intentent des actions au nom de la société, sans pour autant faire preuve de diligence en ne faisant aucune demande par exemple. Ces actions ont en réalité pour unique but de faire obstacle à l’action des associés qui voudront réellement obtenir des dommages-intérêts pour la société.

C’est ainsi que la chambre criminelle a jugé que l’action ut singuli est recevable lorsque « la société, prise en la personne de ses représentants sociaux, n’émet aucune critique » à l’égard de celui dont la responsabilité est engagée  et « n’invoque l’existence d’aucun préjudice » (Cass. Crim, 16 décembre 2009, n°08-88305).

 

Illustration jurisprudentielle : la mise en œuvre de l’action ut singuli en procédures collectives

Dans un arrêt récent rendu le 12 novembre 2020 (n° 19-11.972), la chambre commerciale est venue statuer sur la mise en œuvre de l’action ut singuli après l’adoption d’un plan de sauvegarde.

Faits et procédure

En l’espèce, une SAS familiale a fait l’objet d’une sauvegarde judiciaire. La période d’observation s’est soldée par l’adoption d’un plan. Par la suite, un associé, rejoint par d’autres, a assigné in solidum les différents dirigeants de la société. L’assignation consiste en la réparation d’un  préjudice subi par la société suite à plusieurs fautes de gestion.

L’affaire parvient en appel et la cour d’appel a rejeté la demande des associés. Elle a affirmé que le commissaire à l’exécution du plan avait seul qualité à agir.

Les associés se sont donc pourvus en cassation. La chambre commerciale a cassé l’arrêt de la cour d’appel en affirmant que « l’action sociale ut singuli, qui tend à la réparation du préjudice subi par la société, échappe au monopole du commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde, lequel n’a qualité à agir […] qu’au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers, qui est satisfait par l’adoption de ce plan […] »

L’action sociale ut singuli, monopole des associés

La décision de la cour de cassation est à la fois utile et cohérente.

Une décision utile

A travers cette décision, la cour de cassation dessine les contours des prérogatives du commissaire à l’exécution du plan. Ces contours concernent l’exercice des actions de justice.

En effet, le commissaire à l’exécution du plan a qualité à ester en justice. Cependant cette qualité à agir ne concerne que l’intérêt collectif des créanciers. Le commissaire à l’exécution du plan ne représente pas le débiteur. Il ne saurait ainsi exercer des actions en justice en lieu et place de ce dernier.

Cette décision vient également apporter une précision sur l’action en responsabilité civile. Celle-ci n’équivaut pas à une action en justice qui tend à défendre l’intérêt collectif des créanciers. Il est vrai que cela peut prêter à confusion au sujet des dommages-intérêts alloués à la société. Ceux-ci iront dans le patrimoine de la société et profiteront donc aux créanciers.

Une décision cohérente

Cette décision est cohérente.  En effet, la cour rappelle ici que l’adoption du plan permet un retour aux affaires. Cette dernière pourra à nouveau redevenir titulaire de ses actions en justice.

Cette décision rappelle également que l’action en responsabilité civile contre le dirigeant de la société doit demeurer indépendante des prérogatives des organes de la procédure collective. Les associés, et eux-seuls, pourront exercer l’action sociale ut singuli contre les dirigeants sociaux.

Le cabinet LLA AVOCATS se tient à votre disposition pour envisager une éventuelle action en responsabilité contre un dirigeant pour faute de gestion ou  pour vous défendre si vous faites l’objet d’une telle procédure.

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