La suspension des saisies immobilières lors du redressement judiciaire

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saisie immobilière

La relation entre les saisies immobilières et les procédures collectives a toujours fait l’objet d’interrogations dans le cadre du droit des entreprises en difficulté. La question qui se pose est de savoir ce qu’advient d’une saisie immobilière lors d’un redressement judiciaire du débiteur. En d’autres termes, quelle incidence a l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire sur la saisie immobilière, plus particulièrement celle qui est en cours. La saisie immobilière en cours est celle qui ne présente pas encore une adjudication définitive avant l’ouverture du redressement judiciaire. 

Le principe de suspension des saisies immobilières en cours lors du redressement judiciaire

Le principe de suspension n’est valable que pour les saisies immobilières en cours.

Quel est le principe proprement dit ?

En principe, les saisies immobilières en cours font l’objet d’une suspension lors du redressement judiciaire. En effet, le jugement d’ouverture, selon l’article L 622-21 du Code de Commerce, arrête ou interdit toute procédure d’exécution de la part des créanciers. Cette interdiction porte sur les meubles et sur les immeubles, de même que pour toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d’ouverture (adjudication définitive par exemple).

Cette suspension résulte en fait de la combinaison de plusieurs articles du Code de commerce, à savoir : l’article L. 622-21, II, du Code de commerce, l’article L. 631-14, l’article L. 642-18, alinéa 2, et L. 643-2, alinéas 1 et 3. Cette suspension est également applicable aux autres procédures collectives telles que la procédure de sauvegarde et de liquidation judiciaire. Les effets de la suspension commencent à partir de la date du jugement d’ouverture.

La saisie immobilière en cours

Le principe de suspension ne vaut que pour les saisies immobilières en cours.

Qu’est-ce-qu’ une saisie immobilière en cours ? Il faut préciser en amont que c’est ce caractère en cours de la saisie qui permet la suspension. En effet, ce qui est déterminant, c’est le transfert de propriété du bien au jour de l’ouverture du redressement judiciaire par un jugement. Ainsi, si le bien faisant l’objet de saisie est déjà sorti du patrimoine du débiteur au jour du jugement d’ouverture, la saisie immobilière n’est pas en cours, elle est déjà terminée. Il n’y a plus d’intérêt à ce que la suspension se fasse, car le bien appartient déjà à un tiers comme l’adjudicataire. Par ailleurs, la procédure collective n’atteint plus ce dernier. C’est le cas par exemple de la saisie attribution dont le transfert de propriété est immédiat. 

Lorsque le transfert de propriété n’est pas encore définitif, alors il n’est pas encore sorti du patrimoine. C’est ce qu’a décidé la Cour de cassation dans une affaire en 2014 en cas d’absence d’adjudication définitive de l’immeuble (Com. 04 mars 2014, N°13-10.534). Dans cette affaire, la Cour d’appel a refusé la suspension de la procédure de saisie étant donné que pour elle, la surenchère ne constituait qu’une simple formalité et que l’adjudication était déjà définitive sans elle, ce que la Haute juridiction a débouté. 

Les effets de la suspension des saisies immobilières en cours

La suspension prévue par les textes a pour effet d’arrêter la procédure d’exécution ou toute procédure de distribution n’ayant pas d’effet attributif sur les biens concernés du débiteur, avant le jugement d’ouverture. Le verbe utilisé par le Code de commerce est “arrêter” et non pas “interrompre”. En effet, l’interruption au jour de l’ouverture de la procédure collective ne concerne que les actions en justice, appelées également instances en cours (Com. 27 sept. 2017). 

L’intérêt de ce choix de mots repose dans le fait que les droits du créancier diffèrent selon le mot utilisé. Les actions en justice en cours qui sont interrompues à la date d’ouverture peuvent être reprises alors que les procédures d’exécution sont vraiment arrêtées. 

En outre, le juge de la Cour de cassation a été déjà confronté à une demande d’anéantissement rétroactif des actes de la procédure d’exécution. C’est le cas dans le cadre d’un arrêt du 8 mars 2023 (Com. 8 mars 2023, FS-B, n° 21-18.722) où un mandataire judiciaire a formé une tierce opposition au jugement de constatation de suspension de la saisie immobilière et demandé la constatation de l’arrêt des poursuites. Or, la suspension permet aux actes de la procédure antérieure à l’ouverture du redressement judiciaire de conserver leur fondement juridique. Par ailleurs, tous les actes juridictionnels intervenus préalablement à cette procédure collective ne sont pas aussi rétroactivement anéantis.

La reprise de la procédure possible  ?

La reprise de la procédure est possible si le redressement judiciaire est converti en liquidation judiciaire par une ordonnance du juge-commissaire. Cette ordonnance est rendue sur requête du liquidateur judiciaire et l’autorise à reprendre la procédure de saisie immobilière. Le liquidateur va alors être subrogé dans les droits du créancier saisissant pour les actes qu’il a effectués, selon l’article L.642-18 du Code de commerce.

Le liquidateur va ainsi reprendre le cours de la saisie à la date de la suspension, c’est-à-dire à la date du jugement d’ouverture de la procédure collective. Le juge-commissaire doit fixer la mise à prix, les modalités de publicité et de visite du bien, que celles-ci aient été déjà fixées antérieurement ou non par le juge de l’exécution.

Il faut remarquer que si l’adjudication a été définitive, mais qu’il n’y a pas seulement eu publication, alors elle n’est pas opposable au liquidateur (Com. 11 fev. 2014 N° 12-19722). 

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