Pacte d’associés : précisions sur les clauses de non-concurrence d’un associé salarié

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Les associés d’une SAS peuvent signer, en sus des statuts, un pacte d’associés prévoyant des clauses d’exclusion avec promesse de cession. Mais qu’en est-il si l’associé est aussi salarié. Comment alors appliquer la pacte et la clause d’exclusion de l’associé s’il est également salarié. Notamment, la clause de non-concurrence visée dans le pacte est-elle valable pour l’associé exclu l’empêchant aussi de devenir salarié d’une société concurrente ?

Les clauses de non-concurrence doivent en fait être interprétées plus strictement quand l’associé est aussi salarié et doivent répondre à certaines conditions pour être efficaces juridiquement.

En effet, le juge en contrôle la validité comme en témoigne l’arrêt de la Cour d’appel de Paris rendu en date du 21 octobre 2021 que nous allons examiner dans cet article.

Nous allons préciser les conditions de validité d’une clause de non-concurrence stipulée dans le pacte d’associés ou d’une promesse de cession des actions dans le cas d’un licenciement pour faute grave.

Ensuite, nous allons nous intéresser à l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 21 octobre 2021.

Enfin, en pratique, il conviendra de préciser comment se passe la réintégration de l’associé au sein de la société.

Conditions de validité des clauses de non-concurrence dans un pacte d’associés à l’égard d’un salarié

Par un arrêt rendu en date du 15 mars 2011, la chambre commerciale a durci les conditions de validité d’une clause de non-concurrence stipulée dans un pacte d’actionnaires à l’égard d’un actionnaire jouissant d’un contrat de travail en s’alignant sur la jurisprudence de la chambre sociale.

En effet, elle précise que « lorsqu’elle a pour effet d’entraver la liberté de se rétablir d’un salarié, actionnaire ou associé de la société qui l’emploie, la clause de non-concurrence signée par lui n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour la société de verser à ce dernier une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives » (Cass. com., 15 mars 2011, no 10-13.824 ; cf. également Cass. com., 4 oct. 2016, no 15-15.996).

Ainsi, la validité d’une clause de non-concurrence insérée dans un pacte d’actionnaires à l’égard d’un associé salarié est désormais subordonnée à la réunion des quatre conditions cumulatives suivantes et doit :

  • être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ;
  • être limitée dans le temps et dans l’espace ;
  • tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
  • comporter l’obligation pour l’entreprise de verser à ce dernier une contrepartie financière.

 

Conditions de validité d’une promesse de cession d’actions dans un pacte d’associés

Dans le cas où le propriétaire des parts ou actions promet de les céder sans que l’éventuel acquéreur s’engage, de son côté, à les acheter, il y a promesse unilatérale de cession. La promesse du propriétaire (qualifié de promettant), acceptée par le bénéficiaire, constitue un contrat préparatoire. Elle constituera une vente si, par la suite, le consentement du bénéficiaire rejoint celui du propriétaire, dans le cadre d’une levée d’option.

La promesse unilatérale est définie par l’article 1124 du code civil dans les termes suivants :

« Le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ».

Cette promesse suppose, pour être valable, le respect du droit commun des contrats, et notamment l’absence de vice de consentement.

Par ailleurs, la promesse doit remplir toutes les conditions légales particulières pour qu’il y ait vente : en particulier, un prix d’ores et déjà déterminé ou déterminable de façon objective  (Cass. com., 10 déc. 1991, no 90-15.451), étant entendu que la fixation du prix peut être confiée à l’estimation d’un tiers désigné dans la promesse.

C’est dire que la promesse est nulle si la détermination du prix définitif nécessite l’établissement contradictoire d’un bilan à la veille de la régularisation de la cession, sans que les parties, seules habiles à le faire, aient prévu la désignation, en cas de désaccord, d’un expert chargé de faire l’estimation.

Elle l’est également lorsqu’elle renferme seulement une référence à une offre de cession antérieure estimant la valeur de l’action à « un certain montant » (Cass. com., 9 juin 2004, no 03-11.600).

Sur le plan du formalisme, la promesse unilatérale de vente de parts ou d’actions n’est pas, à la différence de celle portant sur un immeuble ou un fonds de commerce, soumise à un enregistrement.

 

Arrêt du 20 octobre 2021 rendu par la Cour d’appel de Paris

 

Dans cette affaire, un salarié d’une SSII, également associé, signe un pacte d’actionnaires dans laquelle figure une clause de non-concurrence qui lui interdit, pendant qu’il est actionnaire et un an après son éventuelle exclusion, d’avoir une participation ou de travailler dans une société concurrente sur tout le territoire européen.

La société licencié l’associé minoritaire pour faute grave. Suite à ce licenciement pour faute grave, et au fait qu’il a violé la clause de non-concurrence visée dans le pacte, le salarié est exclu et doit céder ses parts.

Dans son arrêt en date du 20 octobre 2021, la Cour annule ce rachat forcé et redonne à l’ancien salarié sa qualité d’associé, estimant que les conditions de validité de la clause de non concurrence dans le pacte n’étaient pas réunies et qu’au surplus le conseil de prudhommes avait déclaré nul le licenciement pour faute grave.

Concernant cette clause de non-concurrence, la cour d’appel a soulevé les éléments suivants :

Cette clause était pas assez limitée dans l’espace et donc disproportionnée par rapport à la volonté de protection des activités de la SSII. Par conséquent elle empêchait concrètement au salarié de travailler en Europe ce qui est excessif.

Même dans le pacte, la clause aurait dû prévoir une contrepartie financière selon la Cour d’appel, dès lors qu’elle s’appliquait à un salarié, même s’il était également associé de la SAS.

En l’espèce, le salarié avait bien qualité de salarié lorsqu’il avait conclu le pacte d’associés.

En pratique : la réintégration d’un associé dont l’exclusion est non valable

En pratique, le premier effet immédiat de l’invalidité de ces clauses est l’annulation de la décision d’exclusion prise sur le fondement de celles-ci.

Ainsi, le rachat forcé est annulé et l’associé salarié redevient propriétaire de ses actions au sein de la SAS.

Cette annulation entraîne la réintégration de l’associé dans ses droits d’associé.

Il est donc important de bien rédiger les clauses d’exclusions dans un pacte d’associés.

 

 

 

 

 

 

 

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